Du 7 au 11 novembre dernier, l’équipe du Positive Education organisait la 4ème édition de son festival dans son fief, à Saint-Etienne. Les organisateurs nous avaient mis l’eau à la bouche quelques semaines plus tôt. On s’imaginait mal être déçus, et on avait vu juste.
Vendredi 8 novembre. Après de longues semaines d’attente, on embarque enfin dans le train pour Saint-Etienne. Destination qui peut paraître surprenante pour un festival de musique. Surpris, on sait déjà un peu qu’on le sera. Si la réputation du « PEF » (pour les intimes) dépasse maintenant les frontières de la France, ça ne peut pas être pour rien.
Arrivés en fin d’après-midi, direction l’appartement réservé pour l’occasion. À quelques jours du festival, il n’y en avait d’ailleurs plus aucun de disponible sur les internets. L’équipe organisatrice a même créé un groupe Facebook pour que les festivaliers venant loin et les stéphanois.es avec un lit en rab puissent se rencontrer. Une bonne preuve de l’engouement suscité par le festival et de la bienveillance de son public local.

Un public prêt à en découdre, Low Jack & Jass en pyromanes du Hall 2 : un premier soir riche en émotions
Sur les coups de 23h, nous voilà devant l’entrée de la Cité du Design, lieu des festivités. On est surpris de la taille de la foule déjà massée aux guichets pour récupérer son billet d’entrée. L’impatience est palpable, mais tout se fait dans le calme.
On rentre enfin après une bonne demi-heure d’attente. Il faut alors rejoindre une seconde foule, celle qui attend pour charger son bracelet “cashless”. Problème : l’organisation du festival n’attendait pas autant de monde si tôt. Les bénévoles sont débordés et il faut s’armer de patience pour arriver devant les sacro-saints “TPE”. Surtout que les murs tremblent déjà au son des basses. Mais encore une fois, tout le monde garde le sourire.

Pour libérer la bête, on jette notre dévolu sur Low Jack & Jasss qui prennent les commandes du hall 2, scène à la programmation très avant-gardiste. Les artistes qui y sont programmés sont réputés pour leur capacité à explorer et expérimenter le mélange des genres. Et les deux compères confirment cette idée : techno, trance, electro, breakbeat, trap, tout y passe. Et tout ça dans un esprit de kermesse complètement débridée : ça saute et ça se bouscule plus que ça ne danse par moments. Petite pensée à cette danseuse qui a cru s’être cassé le nez après un pogo. De quoi rentrer dans le vif du sujet sans trop de détours.
Après cette bonne dose d’adrénaline, on atterri devant Beesmunt Soundsystem, duo hollandais créé il y a une dizaine d’années. Encore une fois, sélection très variée. On passe facilement d’une house tropicale à des sonorités rétro. Moins de fougue qu’au set précédent, mais une technique parfaite. L’ensemble est cohérent et fluide.

Beesmunt Soundsystem – Hall 3 © Hortense Giraud
Pour conclure cette première soirée, on passe voir François X qui a remplacé Jeff Mills au pied levé, ce dernier n’ayant pas pu venir pour une raison qui nous est malheureusement inconnue. On ne cache pas notre déception car même si ça ne représente plus un événement rare, voir Jeff Mills reste un événement.
La révélation Pinch & Kahn, Manu Le Malin et Dave Clarke incontournables
Pour l’épisode 2, on débute avec The Pilotwings, le duo qui s’est fait connaître via le label créé par Judaah, Brothers From Different Mothers. La sélection est originale et recherchée, la musique déstructurée et plutôt lente. Intéressant, mais on ne peut pas s’attarder.
Si on doit s’échapper, c’est parce qu’on ne veut pas manquer le live de Amato (aka The Hacker) & Adriani qui jouent leur EP « Présence du Futur » sur la scène principale. Principale car dans le plus grand des trois halls, et que le budget jeux de lumières se fait sentir. La crise d’épilepsie aussi d’ailleurs. Côté son, le duo rempli entièrement nos attentes. Une techno “darkwave” sombre, dansante, et qui correspond beaucoup à l’identité musicale que le festival s’est construite depuis les premières éditions.

Ensuite, c’est le dilemme. AZF et Zaltan b2b D.K. ? On adore, mais on a déjà vu. On nous propose alors d’aller voir Pinch et Kahn dont on n’a jamais entendu parler. Ça se passe au hall 2 qui est déjà notre hall fétiche, et Gabor Lazar termine son live. Vendu. La suite, une immense claque, un aller retour. La seule “dubstep” qu’on connaissait, c’était celle de l’époque Flux Pavillon, Netsky, et… Skrillex (on fait tous des erreurs). Mais ça, c’était avant. Quoi qu’il en soit, à voir les gens se regarder dans la foule l’air de se dire “mais bordel c’est quoi ce truc de fou ?”, on pense pouvoir affirmer qu’on n’est pas les seuls à l’avoir prise cette claque.
On terminera ensuite la soirée avec Manu Le Malin puis Dave Clarke qu’on ne présente plus. Les deux légendes font ce qu’ils savent faire de mieux. Ça tabasse sans être monotone. Des sets très adaptés au hall de grande taille et à ses jeux de lumières pour une ambiance rave party en intérieur.
Aux 88, Overmono, des lives de grande classe pour un dernier tour de piste
Troisième et dernière nuit. La fatigue et les courbatures sont là, mais c’est pas suffisant pour entraver notre motivation. Car ce soir, il y a du très lourd. Et puis on commence à se sentir un peu chez nous. Les joggings sont de sortie, comme un dimanche à la maison.
Aux 88 ouvre le bal avec son electro tout droit venue de Détroit. Très bonne idée de les faire jouer le dernier soir et assez tôt. Comme un café le matin quand on a la tête dans le cul, ça vous remet d’attaque pour la suite. Armés de leurs machines mais aussi de leurs micros, on a le droit à un vrai show à l’américaine (la preuve ici en vidéo). C’est pas rare de voir les deux légendes quitter leur poste pour venir au tout devant de la scène. On a le smile pendant tout le concert. « We juste have time to play two more tracks, is that okay for you ?« . Et comment qu’on est ok.
Le smile, on l’aura aussi pendant le set de Simo Cell & Judaah. Quand on pense à la scène actuelle et cette tendance incontestable au mélange des genres, notamment entre musiques « urbaines » et « électroniques », on pense forcément à eux. Peu de DJ auraient l’audace de jouer du Nessbeal, du Kekra ou du UZ dans un festival estampillé « musiques électroniques ». Eux si.

© Hortense Giraud
Ce soir là jouaient aussi Karenn (Blawan & Pariah) et Helena Hauff. Encore des pointures. Un peu déçus des deux premiers. On ne sait pas trop si c’est dû au réglage du son ou à l’acoustique, ou bien à leur sélection, mais à part des « boom boom« , on n’en retiendra pas grand chose. Il y a du mieux avec Helena Hauff, une valeur sûre. Beaucoup de classe, mais pas de grande surprise non plus. La fatigue a sans doute joué sur notre enthousiasme. Mais on rejetterait plutôt la « faute » sur des performances toujours plus riches et surprenantes les unes que les autres depuis le début. La barre commence à être (trop ?) haute.
En tous cas pas assez pour les frangins Truss & Tessela qui se produisent en live sous leur alias Overmono. En charge du closing de notre scène fétiche, ils sont un de nos gros coups de cœur de ces derniers mois. Leur techno breakbeat colorée et enivrante tombe à point nommé. On atteint le summum quand ils jouent un de leur tout dernier morceau, « Le Tigre« . Une ambiance électrique et joyeuse flotte dans la salle. On sent que la fin approche. On savoure, mais on est déjà un peu dans la nostalgie.
Un after et un au revoir
On terminera cette soirée le lendemain matin à l’after du festival en compagnie de Théo Muller ou encore Marcorosso & Mouloud. Devenus maîtres experts de la teuf teuf grâce à leurs collectifs Midi Deux et 75021.
Encore une fois on n’en revient pas de la bonne humeur qui s’en dégage, malgré les trois jours de teuf consécutifs, tout le monde garde le sourire. On repère même deux agents de sécurité claquer quelques pas. On retiendra la bienveillance avec laquelle ils nous ont accueilli ces trois soirs. Comme des hôtes bien plus que des vigiles. Ce qui est assez rare pour le souligner.
On en profite aussi pour faire une clin d’œil à toute l’équipe de la Fabuleuse Cantine qui assurait la restauration sur le site. Avec eux, on a bien mangé, mais on a surtout beaucoup ri.
Bref, le Positive Education Festival s’est confortablement installé dans nos cœurs. Une programmation pointue et rafraîchissante. Un lieu cohérent, une capacité idéale pour un festival. Un staff et un public à l’état d’esprit irréprochable. On reviendra, c’est sûr.
Report écrit par nos super reporteufs Simon Rozec & Renaud Friend.