Après deux ans à lorgner sur ses programmations toujours alléchantes, on attendait ce baptême du Lente Kabinet comme un gosse de huit ans à l’approche d’un weekend Disneyland : impatiemment. Direction la Venise du Nord à l’occasion de la septième édition du « Dekmantel version semi-confidentielle ».

Parcourant la réserve naturelle du Twiske, la route qui mène au festival prend rapidement des airs d’excursion. L’austérité du périphérique laisse place à une verdure flamboyante jalonnée de lagunes à la rive desquels les amstellodamois se dorent la pilule en famille. Le site du festival nous livre un décor similaire. Les quelques allées qui dessinent les lieux nous baladent au fil des scènes à travers les arbres, la tourbe et les plaines d’herbes… jusqu’aux rives du « lac » desquelles on peut contempler chaque soir les lumières pourpres du soleil couchant sous le regard espiègle des grands totems de la «  Tweede Kamer ».

Autant vous dire que cet environnement de choix sublimé par le soleil a largement contribué à nous mettre dans cette petite « bulle » euphorique dans laquelle nous nous laisserons nonchalamment flotter jusqu’au lundi (ou peut-être était-ce la weed ?).

lente kabinet

© Niels Cornelis Meijer

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© Niels Cornelis Meijer

L’équipe du Dekmankel a très bien compris que la clé d’un festival de musique réussi réside autant dans une programmation soignée et équilibrée que dans l’élaboration des conditions nécessaires à ce que les artistes puissent « s’exprimer » de la meilleure des manières qu’il soit. En témoigne ces scènes encadrées de speakers impeccablement réglés, proches du public pour que l’osmose fonctionne, mais suffisamment isolées pour que ses occupants soient protégés des perturbations extérieures.

Cette « expertise événementielle » des organisateurs, on la ressent positivement à tous les niveaux du festival. Les bars ne sont jamais engorgés (même si on regrette le rapport quantité/prix des bières), on peut taper des 100 mètres dans l’allée des toilettes tellement elle est longue, l’eau potable est en libre-service (ce qui devrait être obligatoire de nos jours), la circulation fluide…

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© Desiré van den Berg

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© Niels Cornelis Meijer

Tout au long du Lente Kabinet, les divers DJs sets et live qu’il me fût donné d’entendre furent d’une qualité constante, voir pour certains jalonnés de belles prises de risques et autres bizarreries musicales. Que ce soit les warm-ups chaleureux de Kléo, Margie ou John Gomez, les sets allumeurs de Lipelis,  Cinnaman & Casper Tielrooij, l’« old-school-but-joyful » american-touch du b2b de Rahaan et Ge-ology, les lives d’Alexander Robotnick et Kaamal Williams ou la scène pas-si-secrète de l’église… le public majoritairement local fût fidèle à cette ivresse un chouilla libertaire qui caractérise assez bien à mes yeux les nuits d’Amsterdam.

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© Yannick van de Wijngaert

Un point noir entache toutefois ce tableau : le « je-m-en-foutisme » apparent et assumé des hollandais à l’égard de la propreté des lieux. Sans vouloir jouer au Nicolas Hulot de la teuf, il est aberrant de voir autant de déchets plastiques joncher les quatre coins d’un si beau site au fur et à mesure que la journée défile alors même que des poubelles quadrillent volontairement la zone… Pas très COP21 pour le pays du vélo. La partie « artistique » annoncée sur l’événement est également loin d’égaler l’audace d’un Horst Festival. Les installations sont, dans l’ensemble, assez isolées. On ne comprend pas toujours très bien la démarche… Mais cela reste un tantinet anecdotique en comparaison du reste.

Carré dans l’organisation, hédoniste dans l’esprit. Le Lente Kabinet rejoint la courte liste de ces festivals aux vertus « thérapeutiques », de ceux qui vous rappellent pourquoi vous aimez la musique. Une valeur sûre à ajouter dans votre to-do-list.