Depuis l'annulation du set du toulousain Arabian Panther au Berghain la semaine dernière pour sa prise de position pro-Palestine sur les réseaux, le club Berghain fait l'objet d'une vive polémique. Au cœur de cette controverse, une nouvelle clause "anti-discrimination" relance le débat éthique de la liberté artistique des institutions culturelles allemandes face au gouvernement.
La semaine dernière, on apprenait que le DJ et producteur toulousain Arabian Panther avait été désinvité de la soirée « Italorama » du label Ritmo Fatale prévue au Berghain le 12 janvier en raison “de son positionnement pro-palestinien sur les réseaux sociaux”. Pour éviter le “bad buzz”, le célèbre club berlinois avait annoncé l'annulation de l'événement pour des « travaux de rénovation », raison vite démentie par Arabian Panther qui a révélé dans un communiqué sur Instagram les vraies raisons liées à son engagement pour la cause palestinienne.
Dans la foulée de ce communiqué, des soutiens de la scène électronique se sont manifestés comme le label lyonnais BFDM qui a annulé son showcase le 18 janvier au Berghain, ou encore les artistes Jyoty et Manuka Honey qui se sont déprogrammés du festival CTM prévu dans le club du 26 janvier au 4 février. Le Berghain, lui, n’a pour l’instant pas encore réagi.
Les subventions des lieux culturels allemands au cœur de la controverse
Derrière ce débat, les institutions culturelles en Allemagne se trouvent au cœur d’une nouvelle clause “anti-discrimination” ajoutée à la loi par le ministre de la Culture Joe Chialo début janvier, pour les établissements qui “s’engagent en faveur d’une société diversifiée et contre toutes formes d’antisémitisme, conformément à la définition de l’antisémitisme établie par l’Alliance Internationale pour la Mémoire de l’Holocauste (IHRA) et à son extension par le gouvernement fédéral”. Le cas échéant, les subventions ne leur sont pas accordées, ce qui a conduit à l'annulation d'événements et de dates pour les artistes qui expriment des convictions pro-palestiniennes.
Depuis, la campagne anonyme "Strike Germany" appelle au boycott des institutions culturelles allemandes, accusées de réprimer les voix palestiniennes et soulevant des questions éthiques sur le financement et le rôle du gouvernement dans l’organisation des événements. Dans une lettre ouverte, Strike Germany en appelle à protéger le droit constitutionnel à la liberté artistique, y compris les droits à la liberté d’opinion, à la liberté d’association et à la participation à la vie culturelle.
“Les institutions culturelles surveillent les médias sociaux, les pétitions, les lettres ouvertes et les déclarations publiques à la recherche d'expressions de solidarité avec la Palestine afin d'éliminer les travailleurs culturels qui ne font pas écho au soutien sans équivoque de l'Allemagne à Israël. Ces contrôles constituent des violations des libertés protégées par la Constitution et sont de facto des formes cachées de profilage racial.”, peut-on lire sur le site internet.
Une lettre ouverte a depuis recueilli de 6 000 signatures, et s'oppose à ce que les bénéficiaires de subventions artistiques s'engagent à respecter la "définition controversée de l'antisémitisme de l'IHRA".