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Ils sont pionniers des musiques électroniques à Berlin. Le duo System01, formé par Johnny Klimek & Paul Browse, vient de sortir un double LP sur le label Mannequin Records, qui retrace leurs premiers morceaux de 1990 à 1994. Paul est aussi l’un des co-compositeurs de la bande originale de Matrix Resurrections, dernier volet de la trilogie sorti en décembre. Rencontre. 

System01 1990-1994‘ est une référence obligatoire à avoir dans sa discographie. Fondé par Johnny Klimek et Paul Browse, la compilation couvre les premières sonorités du duo, depuis leur premier EP From Psychodelics To Cybernetics en 1990 sur Interfisch avec Timothy Leary, le père de la génération LSD, jusqu’en 1994 avec la sortie de leur album Drugs Work sur Tresor Records. La pochette est aussi emblématique que son contenu, designée par le légendaire Ian Anderson de The Designers Republic, le studio britannique connu pour ses logos et illustrations d’albums pour Warp Records, Aphex Twin ou Autechre. 

De son côté, Paul a aussi participé à la bande originale de Matrix Resurrections sorti le 18 décembre dernier, en signant aux côtés d’artistes comme Marcel Dettmann et Gudrun Gut. On a eu la chance de leur poser quelques questions. 

Vous avez formé System 01 peu après la chute du mur de Berlin, établissant ainsi « le nouveau son de Berlin« . À quand remonte la création de votre duo et quelle était l’atmosphère à cette époque ?

Paul : Pour éviter tout malentendu, « le nouveau son de Berlin » n’est pas une auto-description égoïste… C’est un titre qui nous a été décerné par un journaliste suite à notre collaboration avec Timothy Leary sur l’album From Psychedelics to Cybernetics.

Je me suis installé à Berlin en octobre 1989, juste avant la chute du Mur. Johnny vivait à Berlin depuis bien plus longtemps, et nous avons été présentés l’un à l’autre par notre amie commune Gudrun Gut. Bien que nous soyons considérés par certains comme des antipodes musicaux, Johnny et moi avons découvert que nous avions beaucoup de choses en commun et avons décidé de commencer à travailler ensemble.

Le Mur était encore intact à ce moment-là. Peu après le début de notre collaboration, le Mur est tombé et nous avons fêté ça en nous appelant officiellement System 01. C’était une époque merveilleuse…. Tous les jours et toutes les nuits en studio. Du jour au lendemain, Berlin est devenu un terrain de jeu géant et l’excitation, l’optimisme et la joie étaient palpables.

Mannequin Records sort une compilation de deux LP intitulée System 01 (1990-94), pouvez-vous nous en dire plus sur cette sortie ? Elle couvre les débuts de votre travail, comment la voyez-vous 30 ans plus tard ?

Paul : Le tracklisting a été compilé par Alessandro Adriani (ndlr : Directeur du label Mannequin Records), envers qui nous sommes extrêmement reconnaissants. Il a fait un excellent travail en présentant une section transversale de notre production au cours de ces années de System 01. Ça aurait été une tâche impossible à réaliser pour moi, car j’aime chacun de nos morceaux de la même manière… Non pas parce que nous les avons créés, mais parce que chaque composition est une machine personnelle à remonter le temps. 

Johnny, vous êtes le compositeur du quatrième film de la saga Matrix, Matrix Resurrections, sorti le 18 décembre dernier. Comment s’est déroulé le processus de création de cette bande originale ?

Johnny : Je l’ai fait avec Tom Tykwer, c’est donc une composition entre Tom et moi. Nous l’avons abordé comme d’habitude, en demandant au réalisateur ses inspirations musicales. Lana (ndlr : Wachowski, la réalisatrice) pensait à beaucoup de choses, nous avons été inspirés et avons commencé à composer. Nous avons expérimenté des sons étranges et nous nous sommes lancés. Parfois, nous créions des paysages sonores électroniques que nous orchestrions ensuite. Souvent, on ne savait jamais ce qu’on allait obtenir de Gene Pritsker, l’orchestrateur. C’était un processus créatif complet dans ce sens. 

Lorsque nous enregistrions l’orchestre, nous enregistrions les cordes séparément et nous séparions toutes les cordes, les accords étaient séparés des cordes solos, etc. Tout élément bizarre ou rythmique était également enregistré séparément. Nous avons procédé de la même manière avec les vents, les cuivres et les percussions. Nous le faisons dans un premier temps afin d’avoir beaucoup de possibilités de manipuler et de modifier les choses. On les traite en quelque sorte électroniquement, l’orchestre, est donc devenu une sorte de jam session / sound design. Puis nous avons écrit une vingtaine de morceaux avec ce concept en tête, et nous avons livré ces 20 morceaux en stems au monteur et à Lana également. Elle a ensuite écouté la musique avant le tournage (nous avons écrit la plupart des musiques avant que Lana ne commence à filmer).

Lana faisait écouter notre musique aux acteurs, aux monteurs et aux autres créatifs impliqués. C’était un processus interactif avec les réalisateurs. Lana, par exemple, prenait quelques extraits d’un morceau, quelques extraits d’un autre morceau et combinait les extraits pour nous donner une idée claire de ce qu’elle essayait d’obtenir. Ensuite, nous retravaillions ces tiges mélangées afin de les faire fonctionner.

La compilation est disponible sur le Bancamp de Mannequin Records

English Version 

You formed System 01 shortly after the Berlin Wall fell, establishing “the new sound of Berlin”. When was the creation of your duo and what was the atmosphere at that time?

Paul: In order to avoid misunderstandings, « The new sound of Berlin » is not an egotistical self-description …it is an accolade that was thrust upon us by a journalist following our collaboration with Timothy Leary on « From Psychedelics to Cybernetics ».

I relocated to Berlin in October 1989, just before the fall of the wall. Johnny had been living in Berlin for much longer and we were introduced to each other by our mutual friend Gudrun Gut. Despite being considered by some as musical antipodes, Johnny and I discovered we had a lot in common and so we decided to start working together. The wall was still intact at that point.

Shortly after the start of our collaboration the wall fell and we celebrated by officially naming ourselves System 01. It was a wonderful time…. everyday in the studio, every night down the rabbit hole. Overnight, Berlin became a giant playground and the excitement, optimism, and joy was palpable.

Mannequin Records is releasing a 2xLP compilation entitled System 01 (1990-94), can you tell us more about your release? It will cover the first years of your work, how do you see it 30 years later?

Paul: The tracklisting was compiled by Alessandro Adriani (Label head of Mannequin Records), to whom we are extremely grateful. He has done an excellent job in presenting a cross section of our output during those years as System 01. It would have been an impossible task for me to complete because I love each and every one of our tracks equally …not because we created them but because each composition is a personal time machine.

Johnny, you’re the composer of the 4th movie of the Matrix saga, ‘Matrix Resurrections’, due to be released on 18th December 2021. How was the process of creating this soundtrack? How were the tracks composed?

Johnny: Well I did it together with Tom Tykwer so it was a collaboration between Tom & I. We approached it like always, by reaching out to the director for musical inspiration. She, (Lana Wachowski) gave her ideas and inspired us to just start writing.

We were experimenting with weird sounds and just went for it. Sometimes creating electronic soundscapes and then we’d orchestrate that. Often we never knew what we’d get from Gene Pritsker the orchestrator. It was a complete creative process in that sense.

When we recorded the orchestra, we recorded strings separately and we separate all the strings, the chords were separated from solo strings etc. Any odd or rhythmical stuff would also be recorded separately. We do the same process with the winds, the brass and percussion. We do this in the first stage so we have a lot of possibilities to manipulate and change things around. Sort of treat them out electronically. I mean the orchestra, so it became a sort of jam session/ sound design thing. Then we wrote around 20 pieces with this concept in mind, and delivered those 20 pieces in stems to the editor or Lana as well. She then listened to the music before filming (we wrote most of the music before Lana started filming).

Lana would play our music to the actors editors and other creative people involved . It was an all in interactive process with the film makers. Lana for example would take a couple of stems from 1 piece, a few stems from another piece and combine the  stems to give us a clear idea of what she was trying to get. Then we’d rework those mixed up stems in order to make it work.

The compilation is available on Mannequin Records’ Bandcamp