Après 25 ans de loyaux services, le téléphone le plus connu de la scène électronique – et qui lui a valu son surnom – raccroche le combiné. Terrence Parker aka Telephone Man annonçait sa mise en vitrine au sein de l’exposition du musée Submerge de Detroit, fondé par l’un des membres du mythique collectif Underground Resistance et dédié à l’histoire riche de la seconde génération des producteurs et DJs techno dans cette ville emblématique du genre. Mais que l’on se rassure, « TP » n’arrête pas le métier : son héritier a déjà été trouvé.
Au début des années 80, petit TP mixe déjà dès l’âge de 11 ans dans sa chambre tous les soirs après l’école. Élevé religieusement à Chicago au gospel, au jazz, au R&B ou au classique, c’est auprès de l’un de ses camarades d’école que l’idée d’utiliser un combiné de téléphone (headset) plutôt qu’un casque (headphones) va émerger. Habitué à mixer à toute allure des disques de hip hop à la Grandmasterflash ou ceux de Jeff Mills et aujourd’hui reconnu comme un des maîtres du scratch, du beat-juggling du quickdropping (ces techniques pointilleuses qui consistent à enchaîner et mêler très rapidement plusieurs samples et genres musicaux), c’est après l’avoir vu chez un de ses camarades d’école que Terrence Parker construit le sien.
Littéralement calé contre l’épaule comme un combiné de téléphone, son utilisation s’avère plus simple, techniquement mieux conçue pour entendre les hi-hats qui définissent le centre de la plupart des morceaux de sa sélection, et beaucoup plus stylé d’apparence il faut le dire. Plus résistant et durable dans le temps, Terrence Parker n’en aura gardé qu’un seul et unique durant tout le début de sa carrière jusqu’à en faire sa signature intemporelle. 25 ans, contre parfois quelques mois seulement pour les casques classiques.
Le natif de Detroit fait aujourd’hui partie de ces DJs reconnus internationalement pour ses qualités de djing et surtout par des emblèmes institutionnels de cette ville-étendard de la musique électronique comme le Musée d’Histoire ou le département des études Afro-américaines de l’Université d’Indiana. À force de travail et d’optimisme, Terrence Parker a déjà arpenté plus de 50 pays à travers le monde pour délivrer sa musique et perpétuer ce rôle de passeur – pour redorer l’image de Détroit souvent mécaniquement jugée comme une ville en perdition depuis sa faillite financière il y a 10 ans.
Après son dernier set à San Francisco en décembre 2017, c’est donc tout naturellement au sein de l’exposition du musée Submerge de Détroit que le combiné de téléphone fera son dernier trajet. Grâce à Mad Mike Banks (co-fondateur du mythique collectif Underground Resistance) et John E. Collins, deux figures de Détroit elles aussi emblématiques, ce symbole sera entreposé en vitrine. Terrence Parker a également été louangé par le Conseil Municipal de « sa contribution en tant qu’artiste à la scène techno de Détroit et du monde ».
25 ans après avoir répondu à « l’appel » de Détroit et plus de 100 productions plus tard, nombreux sont ceux qui, à l’échelle du globe, répondent aujourd’hui à l’appel de Telephone Man.