Rencontre avec Sébastien Florin, alias Seb’ de Vinyl Dealer. Moitié du duo Too Many Cars, il est également à la tête du disquaire lillois en vogue dont nous vous parlions déjà ici, et sort « Heroes« , premier Various de son nouveau label Too Many Cars Records.
À la fois gérant d’un magasin, Vinyl Dealer, mais aussi en tant que dj et producteur, et maintenant avec le lancement de votre label, tu as une palette assez complète d’activités. Tu nous racontes comment tout a commencé ?
Tout a plus ou moins commencé au cours de nos années lycée avec le grand-frère de Maxime (mon meilleur ami depuis 3 ans) et mon acolyte de Too Many Cars. On découvre la Retro House, le mix de deux morceaux sur un ordi, et Galaxie (la radio électronique locale). C’est son frère qui nous met véritablement dans le bain.
C’est ensuite à la sortie du lycée, lorsque je décide d’étudier en Irlande pendant 2 ans que l’aventure continue. J’arrive à Dublin, ville du vice quand tu es jeune : j’ai tout juste 19 ans et c’est la fête tous les jours ! À force d’aller en boîte, je finis même par mixer dans le plus grand club de la ville au bout de 6 mois. À cette époque, mes oreilles traînent dans tous les clubs du coin. C’est là que je découvre tous les types de musique électronique possible, que ce soit Pan-Pot, Nina Kraviz, ou encore Deetron, Fred P, Dave Clarke. Je m’immerge à fond là-dedans !
Puis je rentre à Lille pendant les vacances d’été, et c’est à ce moment-là qu’avec Maxime, on se décide à lancer Too Many Cars. Je fais ma deuxième année en Irlande, avec une résidence dans une boîte house/funky pour finalement revenir sur Lille et lancer le projet.
Too Many Cars, c’est à la fois Seb’ et Max’, deux djs qui se produisent un peu partout, mais aussi un duo de producteurs. Tu peux nous parler un plus du projet et la cohésion au sein du groupe ?
Au départ, je tournais solo dans les petits bars de Lille. Maxime a toujours été le producteur de l’équipe. Donc je tournais pas mal, puis à deux on a commencé à faire toutes les boîtes de la ville, à décrocher quelques dates, à tourner dans les clubs de la région…
Maxime, qui est plutôt tourné à la création musicale, commence à agrémenter nos sets avec des prods que l’on travaille tous les deux – dans un premier temps pour se faire marrer. Lui produit beaucoup, et on essaie de se voir à deux pour penser nos tracks. On écoute, prend des modèles qu’on aime bien, des styles que l’on affectionne, des plans, et ainsi de suite. De là, on teste quelques trucs, on conçoit l’architecture, puis Maxime s’y met, et on avance au fur-et-à-mesure, il fait le mixage, etc… Moi, j’arrive au début et à la fin. C’est une belle alchimie dans le groupe, on échange beaucoup, on se donne plein de conseils : lui il fait vraiment le son. Moi c’est les soirées, les échanges. Tout ça s’articule très bien entre nous.
Puis c’est avec « I Feel You » que vous commencez à vous faire remarquer ?
On commence à se faire connaître grâce au réseau des Chineurs de House. À l’époque, ils organisaient un concours pour mettre en lumière les jeunes producteurs. On décide de poster là-dessus nos premiers sons. Certains se font remarquer mais c’est avec « I Feel You » que l’on arrive en finale de ce concours. Elle finit repostée sur la chaîne Houseum, ce qui contribue à la faire connaître pour finalement être signée sur un Various chez De la Groove.
C’est à cette période que tu décides de te lancer dans l’entrepreneuriat en tant que disquaire avec Vinyl Dealer ? L’histoire raconte le disquaire Rough Trade y est pour quelque chose…
C’est ça ! C’est vers 2012, lors d’un passage chez ce disquaire suite à un festival que je découvre le monde des vinyles. À cette époque je n’en achetais pas encore vraiment, mais l’idée m’est restée en tête.
C’est à la fin de mes études que je me rends compte que je ne sais pas vraiment quoi faire ensuite. Il n’y a pas réellement eu de déclic, en fait. Au départ, j’avais un projet de concept-store pour mêler à la fois bar et disquaire qui n’a pas abouti, mais l’idée continuait de germer. Mes parents m’ont toujours soutenu et encouragé à me diriger vers ce que j’aimais et me lancer avec passion dans un projet. Puis un sursaut arrive lorsque mon père me fait rencontrer une grossiste de vinyles, qui me dit que si je suis persuadé de vouloir faire ça, c’est qu’il est temps pour moi de foncer !
Un an après être devenu disquaire et avoir appréhendé le public lillois d’une nouvelle façon, comment tu vis la chose ?
Je ne regrette absolument pas ! J’ai pas vraiment pris le temps de réfléchir plus que cela, pas d’études de marché, mais surtout un constat : la ville de Lille est active. Beaucoup de mélomanes, une envie de faire la fête, et seulement quelques disquaires qui ont chacun leur style, et qui se complètent bien pour nourrir cette faim du public. Ça crée une belle émulsion dans la ville !
titre personnel et pour mon duo Too Many Cars, cela nous apporte aussi une légitimité supplémentaire. Pour être booké, les gens ont besoin d’un truc, d’un label ou d’un collectif sur lequel s’appuyer. Donc le magasin complète bien mon activité. Et c’est vrai que cette légitimité a fait aussi office de tremplin, nous a ouvert pleins de portes, jusqu’à aller mixer pour Boiler Room !
C’était quelque chose que tu avais dans tes projets en te lançant à fond dans la musique ?
C’est sûr que Boiler Room, c’est vraiment une super expérience. On se fait contacter un mois avant la date : ils suivaient les gars de Lille depuis quelques temps, et on a été les personnes retenues. Ça nous a fait carrément plaisir ! Un rêve qui se réalise, et ça a été difficile de garder le secret pendant tout ce temps…
À nos débuts, on a toujours eu des paliers à atteindre : jouer en boîte, puis viser un club précis, puis jouer en festival, puis sortir un morceau, jouer dans une Boiler Room, et ainsi de suite. Chaque fois tu te mets un objectif, puis tu te challenges en cherchant à atteindre le suivant.
Et c’est dans cette idée de paliers à surmonter que tu en es venu à te lancer dans la création d’un label ?
Too Many Cars Records, c’est un peu plus par accident. On commençait à faire nos sons, ça tournait bien, des DJs que l’on aime beaucoup commencent à les jouer. Mais à la base je ne voulais pas le faire : entre les soirées et le magasin, je ne ressentais pas le besoin de sortir un autre projet. Puis c’est Nick V, toujours riche de bons conseils qui m’a soufflé l’idée : “la suite logique, c’est un label” ! On a réfléchi avec Maxime, et on s’est dit que c’était sûrement le bon moment pour se lancer. Un label, ça permet aussi de produire nos sons à nous, ou faire briller ceux que l’on aiment, et faire connaître l’italo/house, notre passion, car il n’y en a pas beaucoup en France.
Vous aviez un leitmotiv pour cette première sortie ?
Pour la première release, on a simplement fait une liste de producteurs que l’on que l’on adorait. Ils étaient tous chauds, on a bouclé le projet en deux semaines. On a eu de la chance avec Too Smooth Christ qui cartonne et qu’on adore, avec un morceau house et acid avec ces synthés, mais aussi de supers morceaux de Leon X Leon et Donald Dusk, et notre morceau plutôt house/breakbeat, un peu à la Bicep.
Découvrez en exclusivité le track de Too Smooth Christ
Justement, on te connaît grand fan de Bicep. Tu peux nous en dire plus sur tes sources d’inspirations ?
Notre style, c’est vraiment tout ce qui tourne de l’italo et de la house. Bicep a toujours eu une longueur d’avance avec cette capacité à mixer le style de musique qui sera à la mode dans 2 ans. Ils commencent l’italo en 2013 quand personne ne connaît, et à faire de la house garage au début. En 2015, je les vois jouer de la trance en festival, le tout avec une grande cohérence qui leur est propre.
Une autre source d’inspiration c’est l’écosystème Dekmantel. Ils ont su se créer une identité musicale avec le temps. D’ailleurs c’est l’équipe organisatrice qui est venu pour faire la soirée de pre-release au Magazine Club. Et en terme d’ambiance, ils savent y faire ! Puis il y a Gerd Janson et son label Running Back, ou Lauer également qui nous parlent beaucoup.
Avec tous ces paliers atteints, quelle est la suite que tu comptes y donner ?
On espère pouvoir faire et terminer un full EP Too Many Cars. On produit beaucoup actuellement, avec quelques projets sur différents labels dans les mois à venir. Également continuer de faire vivre Too Many Cars Records avec un Various, ou bien sortir un projet d’un gars que l’on aime beaucoup. Et bien sûr continuer à faire vivre la boutique et nos soirées !
Pour vous procurer « Heroes« , le premier Various de Too Many Cars Records, rendez-vous sur leur Bandcamp. Et pour ceux qui souhaitent venir rendre visite à Seb’ chez Vinyl Dealer, toutes les infos sont sur la page Facebook.